Les « deux sessions » de la Chine marquent à la fois une continuité et une nouvelle direction en matière économique et politique

Lundi, la Chine a conclu ses réunions annuelles de la Conférence consultative politique du peuple chinois et du Congrès national du peuple, communément appelées les « deux sessions ». En ce qui concerne l’économie, Beijing a annoncé un objectif de croissance du PIB « d’environ 5 % », soit la même cible qu’en 2023.

Mais de nombreux observateurs doutent de la capacité de la Chine à atteindre ce taux de croissance. Son économie est confrontée à de forts vents contraires : un secteur immobilier en difficulté, une demande des consommateurs en baisse, d’énormes niveaux d’endettement des administrations locales et des tensions géopolitiques qui ralentissent considérablement les investissements étrangers.

Les rapports officiels de la Chine sur son économie suscitent également un scepticisme croissant, compte tenu de l’opacité grandissante des données sur lesquelles reposent ces prévisions. Le groupe américain Rhodium s’attend à ce que le taux de croissance réel du PIB de la Chine cette année soit plus proche de 3,5 %. 

Les réunions laissent entrevoir une modification des priorités du gouvernement chinois, qui s’éloigne de la « croissance à tout prix » pour se tourner vers un développement de « haute qualité » axé sur la fabrication de pointe et l’innovation technologique, alors que la sécurité nationale et l’autosuffisance commencent à l’emporter sur la croissance économique, qui était la priorité absolue du Parti communiste chinois (PCC).

Un changement à plus long terme est accéléré par les deux sessions, soit la modification de la loi organique du Conseil d’État, qui donnera au PCC un contrôle plus étroit du cabinet et dans le cadre de laquelle les membres cesseront de contribuer activement à l’élaboration des politiques pour l’État pour devenir de simples exécutants des décrets du PCC.

 

Annulation de la conférence de presse du premier ministre
 

Les deux sessions de cette année ont cependant été marquées par un autre événement important : la conférence de presse du premier ministre, qui constitue normalement une rare occasion pour les hauts fonctionnaires de répondre directement aux questions des journalistes sur les objectifs politiques de la Chine, n’a pas eu lieu. Cette pratique, établie il y a plus de trente ans, a été abruptement abandonnée cette année sans explication. Certains observateurs en ont profité pour clamer que la politique chinoise se « retirait encore une fois dans une boîte noire ».
 

Répercussions mixtes pour le Canada
 

Étant donné ses défis économiques, le gouvernement chinois désire attirer des engagements et des investissements étrangers, y compris des États-Unis, de l’Union européenne et du Canada, ce qui « pourrait permettre à Ottawa de poursuivre ses “efforts diplomatiques pragmatiques” auprès de Beijing et de rechercher des possibilités de collaboration sur des questions d’intérêt commun, y compris la coopération climatique et la lutte contre le commerce illicite de stupéfiants », a déclaré à Observatoire Asie Vina Nadjibulla, vice-présidente, Recherche et stratégie à la FAP Canada. Mais elle ajoute que « le contrôle accru du Parti sur les institutions de l’État et l’obscurcissement des idées des décideurs politiques chinois rendront les affaires avec la Chine de plus en plus difficiles. »